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VESTIGES 1914 1918

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Extrait de l’historique du 26 RI

 

 

 

 

Offensive de la Somme (Juillet 1916)

 

BATAILLE DE MARICOURT

 

L'offensive de l'ennemi sur Verdun est enrayée, c'est le moment de la revanche.

 

Le régiment est envoyé dans la Somme. Il embarque à Revigny le 21 avril et débarque à Sableux, de là il se rend à Saint-Sauflieu. Voici Pâques et les beaux jours. Un moment de détente est accordé; on l'utilisera à s'instruire, d'autant plus que les Anglais ont l’œil sur nous. S'il faut en croire la rumeur publique, nos alliés auraient demandé à avoir le 20e corps à leurs côtés pour opérer en jonction avec lui dans l'effort qu'ils préparent.

 

Mais comme il y a beaucoup d'Anglais dans la région, il faut leur faire de la place. Le régiment est donc envoyé à Sceux, Bougainville, Fluy, plus au nord, et l'instruction continue.

 

Le général BALFOURIER est décoré par le général JOFFRE à Fluy et reçoit ensuite un grand ordre russe. C'est une joie pour tout son corps d'armée qui lui est si profondément attaché.

 

Le 2e bataillon reçoit un nouveau chef, le commandant BAILLE, ancien capitaine au 26e régiment d'infanterie, avant la guerre.

 

Nous voici bientôt à Suzanne et à Maricourt, aux premiers jours de juin. Le secteur du 20e corps s'étendra entre Maricourt et la Somme. Il était tenu jusqu'ici par deux bataillons anglais. On y met deux régiments de la 11e division qui auront à effectuer sa transformation. Ils ne disposeront peut-être que de quinze jours ! Le régiment est du nombre. Il accomplira le tour de force demandé. Long boyau d'accès, de 7 kilomètres de longueur, des places d'armes, des abris, des dépôts, tout est créé de toutes pièces en moins d'un mois. Quel bel effort ! Qui ne se souvient du verger de Maricourt où il n'existait pas un fossé, pas un trou le 1er juin, et qui, à partir du 1er juillet, sera le lieu de refuge de tous les bataillons, se reformant entre deux combats !

 

Le régiment n'a jamais été aussi en forme. Les journées semblent trop courtes, tant l'ardeur est grande. Tous les records sont battus. La tâche de chaque terrassier s'élève à plus de 2 mètres cubes et est abattue chaque jour. Tout est préparé dans le plus menu détail. Il y a profusion d'artillerie et rien ne paraît encore avoir troublé la quiétude de l'ennemi, du moins de ce côté. Les camoufleurs font des merveilles; ils remplacent les arbres naturels par des arbres observatoires et y disposent d'ingénieux périscopes. Les musiciens se distinguent eux-mêmes, en creusant un vaste poste de secours près du petit cimetière de Maricourt où les tombes s'alignent entre des rangées de roses que vient cueillir parfois notre excellent médecin divisionnaire M. MOURET. Enfin, huit sapes russes vont permettre d'ouvrir en une nuit, la nuit qui précédera le jour J, une parallèle de départ à I00 mètres plus en avant comme il a été prescrit.

 

Le jour approche. Fixé d'abord au 28 juin, il est reporté au 1er juillet. L'artillerie fait rage depuis six jours. Tout paraît détruit, nivelé. L'enthousiasme est grand, on va se venger de Verdun. A 7 h 30, toute la ligne s'élance, spectacle inoubliable ! Le 26e, dans un ordre impeccable comme à la manoeuvre, avance toujours. Le bois de l'Endurance, le point délicat où le général de division avait promis avant l'attaque de venir embrasser le colonel, est débordé, dépassé.

 

Le 26e a atteint la crête des observatoires, l'objectif il doit s'arrêter pour le moment et qui cache encore une fois une tranchée à contre-pente, renforcée de réseaux de fils de fer : la tranchée rouge. Il faut attendre que les éléments, à gauche et à droite, progressent, car leur débouché a été moins facile. Le bataillon MIMAUD (3e bataillon) et le bataillon BAILLE (2e bataillon) s'enterrent au plus vite. Ce travail sous les rafales est impressionnant.

 

Pendant ce temps, le 1er bataillon, qui est en réserve, récolte le nombreux matériel que l'ennemi, surpris par le choc, a laissé dans ses tranchées; il s'est rendu d'ailleurs en grand nombre (4 officiers et 255 Allemands). Comme on voudrait aller plus loin! mais on n'y peut songer. Tout dépend, en effet, de l'avance des Anglais à gauche, et c'est de ce côté que les Allemands ont accumulé le plus gros de leurs forces, du moins pour le moment; on s'en rend bientôt compte à la violence de leurs contre-attaques, à l'âpreté de leur résistance.

 

La 39e division qui nous sépare des Anglais a, elle aussi, un gros morceau à enlever, le village d'Hardecourt.

 

Enfin, elle avance; le 1er bataillon qui a relevé le 3e à gauche y aide. Mais il faut céder la place aux chasseurs à pied de la 47e division, commandée par le premier colonel du 26e, au début de la guerre, le général DE POUYDRAGUIN.

 

Le régiment passe en deuxième ligne, prêt à appuyer et attend au ravin Fargny le moment d'intervenir. L'attaque de la tranchée rouge tentée une première fois ne réussit pas. Il est reconnu qu'avant de recommencer, il faut procéder à une préparation soignée. On dispose donc de quelque temps. La 11e division est repliée un peu plus en arrière.

 

Le régiment est au camp de Méricourt le 12 juillet; dans la période qui suit, il est réorganisé, le D.D. (I) est formé à l'aide des 4e, 8e et 12e compagnies, les C. M. sont définitivement rattachées aux bataillons. Puis le régiment se porte en avant le 19 juillet et revient séjourner quelques jours à une petite étape du champ de bataille, au camp des Célestins.

 

(1)      Dépôt divisionnaire

 

ATTAQUE DE MAUREPAS (30 JUILLET 1916)

 

Le 26 juillet, nous sommes de nouveau en ligne. Les chasseurs ont bien travaillé, la tranchée rouge est prise. Mais ils sont arrêtés devant Maurepas, accrochés de façon assez précaire aux revers de la pente escarpée qui domine au nord la ligne d'un petit chemin de fer à voie étroite, bien vite appelé le Tortillard. On continuera à pousser de l'avant.

 

La nouvelle attaque qui vise Maurepas est pour le 30. Elle sera dure. Le ravin du Tortillard est un nid à projectiles où l'on ne peut songer à se grouper. De la tranchée rouge jusque-là, la pente est descendante, en pleine vue de l'ennemi, sans un seul cheminement. A gauche, Maurepas forme un bastion bourré de mitrailleuses. Comme le 1er juillet, l'attaque sera menée par le commandant MIMAUD à gauche, le commandant BAILLE à droite.

 

Le régiment se place dans la nuit. Le 30, au matin, il est entièrement massé sur l'escarpement au nord du Tortillard. L'heure sonne. Hélas ! il fait un brouillard empêchant de discerner à quelques pas autour de soi. A droite, les mitrailleuses crépitent. Une contre-attaque ennemie, peut-être même une attaque, s'est déclenchée au moment même de notre départ. Il y a là un tertre, puis un chemin creux qui facilitent la défense. Le lieutenant SAUVAGEOT y pourvoit. Il est debout, la canne à la main, exhortant ses hommes. Il est atteint en plein front. Le lieutenant MOUTHON est là aussi avec un canon 37, le premier du régiment, reçu la veille. Il a déjà dressé des servants et tire à bout portant. La contre-attaque est arrêtée, mais nous devons rester sur place de ce côté. A gauche, le reste du 2e bataillon et le 3e bataillon se sont élancés. Le brouillard se lève. Que s'est-il passé? Les hommes sont plaqués à terre. Tous ces trous d'obus qu'on apercevait devant la première ligne étaient organisés et sont garnis de mitrailleuses. Ni à gauche ni à droite du régiment les voisins n'ont avancé.

 

Maurepas tient toujours. Les nouvelles arrivent lambeau par lambeau. La circulation des agents de liaison est pour ainsi dire impossible sur cette pente nue, balayée uniformément.

 

Le capitaine RAUX (10e compagnie) est ramené grièvement blessé. Le capitaine HUIN (C. M. 3), cet officier d'élite, dont la compétence comme mitrailleur est universellement connue, est tombé au départ. Le commandant MIMAUD est couché dans un trou d'obus, blessé à mort. Il est avec sa première ligne. Comme Bayard, dont il a l'âme et la foi, il tient à mourir face à l'ennemi et fait pour cela ses dernières recommandations à l'un de ses agents de liaison qui l'assiste.

 

Il faut secourir cette gauche. On concentre le tir sur Maurepas... Un avion fait signe d'arrêter : nous avons des hommes contre le village, dans le cimetière ! Aussi loin? C'est impossible: Le fait est exact cependant. Ce sont des braves des 9e et 10e compagnies. Pris sous les feux des deux partis, ils sont arrivés à attirer l'attention de l'avion en lui renvoyant les rayons du soleil avec des débris de métal tombés sous leurs mains. La nouvelle est confirmée par le capitaine COTTENET lui-même, commandant la 9e compagnie. Un peu plus à gauche, se trouve le lieutenant ASCOLA de la 10e. « Ils ne demandent qu'à tenir jusqu'au dernier », a écrit COTTENET sur un bout de feuille de son carnet. Qu'on les renforce, dès que cela sera possible.

 

La nuit tombe. On se regroupe enfin. Le Ier bataillon relève à gauche le 3e bataillon dont le capitaine AUBRY s'est employé à recueillir les débris. Comme il en manque, hélas ! au 2e comme au 3e bataillon: 13 officiers dont 10 tués et 446 hommes tués ou disparus.

 

Le capitaine BALICOURT (6e compagnie), parti avec son élan habituel, a été tué à bout portant en mettant le pied sur la tranchée ennemie. Il n'a pu, hélas ! être ramené. Les lieutenants DE PILLOT et BERTRAND l'ont suivi et ont disparu. Le lieutenant CHAMAYOU, un autre brave, est revenu la gorge traversée; il ne peut plus parler; entouré par un groupe ennemi, il s'est rué sur ses adversaires et les a terrassés, seul contre dix. Le sous-lieutenant WETZELMEYER est, lui aussi, parmi les morts. Tous ont rivalisé de courage et d'ardeur. Pour en être convaincu, il suffisait de les regarder au départ, même ceux qui attaquaient pour la première fois, comme ce brave petit caporal POUZET, de la 5e compagnie, si calme, si confiant, qui attendait l'heure en grignotant une barre de chocolat, et qui lui aussi n'est pas revenu.

 

La préparation est reprise, l'assaut sera renouvelé avec l'aide d'autres unités. Le régiment se replace en deuxième ligne, en soutien; mais les efforts restent momentanément inutiles. Ils devront être renouvelés bien des fois avant d'arriver jusqu'à Combles.