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Annexe
n° 81.
Au Q. G. A. le 26 avril
1915
VII e ARMÉE.
ÉTAT-MAJOR.
3 e BUREAU.
N e 649/A Sop.
SECRET.
Le
général de division de Maud'huy, commandant la
VIIe armée, à Monsieur
le
général commandant le groupe provisoire de l'Est.
J'ai l'honneur
de vous rendre compte des dispositions, que j'ai cru devoir prendre, en
conformité des instructions contenues dans votre lettre secrète n° 1493, en
date du 23 avril (1).
En arrière du
front tenu par la 41e division et pour parer a toute offensive possible de l'ennemi débouchant
de la région de Strasbourg, je maintiens en réserve un des régiments de la
82e brigade dans la région St-Michel, Nompatelize,
Etival.
A l'autre
extrémité du front, l'organisation défensive des secteurs, impartis tant à
la 57e division qu'au groupement sud sous les ordres de M. le
général Cordonnier (2), est fortement constituée. Seuls certains points de
la 2e ligne du groupement Legros (3) sont à terminer avec le
concours de compagnies de travailleurs demandés à la place de Belfort.
Ainsi que je vous ai déjà rendu compte, la progression méthodique vers le Kalberg se poursuit.
Il reste
entendu que la brigade de la 57e division, réserve du secteur de
Belfort, ne sera pas déplacée pour renforcer, le cas échéant, l'une ou
l'autre des 47e et 41e divisions. Toutefois, en vue
d'une action possible dans la vallée de la Thur, j'ai fait étudier les
conditions de son transport soit par voie ferrée, soit par automobiles et
je vais prescrire, dans ce but, l'aménagement des routes et chemins pouvant
relier les vallées de la Thur et de la Doller.
Le massif du Rossberg est impraticable, tout au plus pourra-t-on y
créer une ou deux pistes.
Je crois devoir
ajouter qu'il me semble utile, au cas où des succès très importants sur une
autre partie du théâtre d'opérations viendraient modifier la situation
générale de nos armées, de prévoir une action offensive en plaine, avant
même que nous ayons couronné les crêtes qui dominent l'Alsace.
On peut, en
effet, devant la certitude de n'avoir en face de soi que des troupes à la
fois sans renforts et diminuées de moral, tenter une opération plus hardie
destinée à produire un résultat tangible. C'est dans cet ordre d'idées que
j'ai l'intention d'inviter le général Cordonnier à étudier une action
offensive énergique de la 57e division en liaison avec la 66e
division.
Entre le secteur
de St-Dié et celui de Belfort, les opérations
offensives se poursuivent suivant les directives que j'ai adressées, à la
date du 22 avril, aux 47e et 66e divisions (4).
La 47e
division reprend l'opération sur le Sillackerwasen,
qui n'a réussi qu'en partie. Les conditions dans lesquelles cette attaque a
été montée ont été modifiées, en vue d'obtenir une préparation plus
efficace par l'artillerie et une coordination des efforts mieux réglée.
Cette offensive est d'ailleurs combinée avec une action menée, au sud de la
Fecht, par la brigade Boussat,
de la 66e division, qui, déjà établie sur le contrefort du Schnepfenrieth, poussera sur Anslasswasen,
Steinabrück.
L'attaque du Sillackerwasen aura lieu, selon toute vraisemblance,
vers le milieu de cette semaine (27 avril-2 mai). Une fois maîtresse de
cette position, la 47e division entamera l'opération ultérieure
sur le Braunkopf, en enveloppant de près ce piton
par l'ouest sur le front approximatif : Altmattkopf,
Pfeiferberg, Sommerlitt.
Cet enveloppement sera complété au sud par une nouvelle poussée que la 66e
division entreprendra sur Metzeral. Cette série
d'offensives concentriques nous permettra de boucler jusqu'en ce point la
haute vallée de la Fecht.
Mais, tout en
poursuivant activement les préparatifs de ces attaques, qui seront
exécutées d'ici peu, le général commandant la 47e division ne
perd pas de vue l'importante opération du Linge. Tous les travaux
d'aménagement et de construction sont déjà entamés et conduits suivant un
programme détaillé, que j'ai approuvé. Deux btns
du 43e territorial; un btn du 58e
territorial, un btn de la 151e brigade
(5) remplacé dans quelques jours par 1.200 travailleurs territoriaux, que
je vais recevoir, sont employés à ces travaux. Si le mauvais temps ne vient
pas nous gêner, tout porte à croire que la préparation sera complètement
achevée vers le milieu de mai et que l'on pourra passer à l'offensive, que
j'ai étudiée et dont je vous ai déjà soumis les grandes lignes.
Or, dans votre
lettre secrète n° 1493, du 23 avril (6), vous m'invitez à différer
l'exécution de cette opération sur le Linge, en donnant la priorité à
l'opération du Kahlerwasen.
Je prends la
respectueuse liberté de soumettre à votre bienveillante attention certaines
considérations que m'ont suggérées et l'examen attentif du terrain et les
entretiens que j'ai eus, à ce sujet, avec le général commandant la 66e
division.
Le Kahlerwasen est une masse énorme, qui domine toute la
région entre Fecht. et Lauch.
De son sommet se détachent en pentes plus ou moins raides des arêtes
rayonnantes descendant sur les deux rivières. C'est un observatoire qui
permet de plonger au nord et au nord-ouest, à six kilomètres, dans la
vallée de Munster; au sud, à 5 km dans la vallée de Linthal.
Mais sa possession ne permettrait qu'une action éloignée; la ville de
Munster, elle-même, échappe à ses vues.
Étant donné
qu'on ne peut songer à affronter ce piton ou mieux ce centre d'arêtes
rayonnantes par un seul point, l'investissement du massif est à rechercher
tant par Munster et Sondernach que par Linthal.
Si nous
examinons les conditions d'une offensive par le sud (région de Linthal), nous voyons que cette offensive se heurte aux
difficultés les plus sérieuses; il s'agit, en effet, de gravir 800 m. de
différence d'altitude avec l'obligation de créer des chemins actuellement
inexistants. Il ne faut pas oublier que les chemins chariottables,
qui descendent dans la haute Lauch, sont pour un
mois encore encombrés de neige et que les déplacements et installations du
matériel d'artillerie constitueront des problèmes d'exécution des plus
délicats.
Les
ravitaillements et évacuations de toutes sortes ne peuvent s'envisager que
d'une façon fort problématique. Dans ces
conditions une action offensive par le sud ne peut être entreprise, à mon
avis, avec chance de succès.
Par l'ouest,
l'unique terrain de progression est évidemment la ligne de hauteurs Langenfeldkopf, Hilsenfirst,
Steinberg. Sur cette ligne de crête entièrement dénudée, l'attaque, qui se
présente sur un front resserré, ne saurait convenir qu'à une action d'aile.
De ce côté, également, les ravitaillements seraient difficiles, si l'on
songe qu'une journée de mulet est nécessaire pour amener les
approvisionnements de la vallée de la Thur (Kruth)
par delà la crête du Breitfirst
(1.3oo m. d'altitude).
Par le
nord-ouest, la direction d'attaque emprunte l'arête, qui de l'Ilienkopf se dirige vers le sud-est par le Steinberg.
De ce côté nous trouverons des chemins nombreux, bons et défilés, des
couverts assurés par les bois pour les abris à construire, etc.
En résumé,
j'estime que l'attaque du massif du Kahlerwasen
est à mener simultanément par le S. O. en partant du Langenfeldkopf
et par le N. 0. de Mühlbach par l'Ilienkopf. L'attaque de droite serait plus légère tant
en raison de l'étroitesse obligée de son front que des difficultés de
ravitaillement, l'attaque de gauche restant la principale, la plus forte,
mais couverte obligatoirement par la possession des hauteurs nord de Munster.
Celle-ci me
paraît donc indispensable pour mener à bien l'attaque du Kahlerwasen. Par voie de conséquence, cette dernière
attaque doit suivre, dans l'ordre logique, l'action sur le Linge, Barrenkopf, qui, après le Kuhberg,
nous permettra d'atteindre et le Frauenackerkopf
et le Reichackerkopf; elle participe donc de
l'offensive de la vallée de la Fecht.
J'ajouterai
enfin que cette attaque est postérieure également à l'opération du Linge,
au point de vue de la préparation.
Tandis que, du
côté du Linge, les lignes ennemies se trouvent à peine à 400 m. l'une de
l'autre, les objectifs d'attaque sont reconnus, les travaux de préparation
tous entamés et en bonne voie, que la date d'exécution de l'attaque peut
déjà être approximativement fixée, du côté du Kahlerwasen
il n'existe encore que de simples contacts entre les avant-postes très
légers poussés à Hilsenfirst et à Romspach, c'est à dire à environ 3 km à 3 km 5oo du
Petit Ballon (7).
Il est à
remarquer, en outre, que la situation générale vient de se modifier. Le
départ d'Alsace tout récent de la Garde impériale ne semble plus donner à
l'ennemi la supériorité du nombre et la possibilité, tout en résistant de
front à nos attaques, de nous contre-attaquer en forces sur l'un des points
sensibles de notre ligne.
D'ailleurs, en
vue de couvrir vers le nord les troupes qui prendront l'offensive sur le
Linge, j'ai prévu un flanc défensif solide sur le front Tête-de-Faux, Noirmont, destiné à s'opposer à toute menace de
l'ennemi qui se produirait entre Orbey et le
Bonhomme.
J
ai prévu de même au sud, face à l'Eichwald d'abord et plus au sud au Reichackerkopf,
toutes les dispositions nécessaires pour parer aux contre-attaques qui
pourraient se produire et assurer la sécurité de mon flanc droit, jusqu'à
ce que, maître de l'Eichwald, je puisse attaquer
le Reichackerkopf et m'en emparer, en complétant
ainsi la prise de possession de toutes les hauteurs dominant au nord la
vallée de Munster.
Je vous serais
obligé de me faire connaître si vous partagez ma manière de voir et si je
puis poursuivre activement la préparation de l'opération du Linge, tout en
laissant la 66e division progresser, comme il lui a été prescrit
en vue de l'attaque plus éloignée du Kahlerwasen,
d'une part sur Hilsenfirst et Ilienkopf,
d'autre part, au sud de la Lauch vers Olschwaseri, Judenhutplan et Ospenkopf.
Dans le cas où
vous jugeriez nécessaire de conserver la priorité à l'opération du Kahlerwasen, je ne crois pas possible d'indiquer dès
maintenant la date même approximative de l'exécution de l'attaque de ce
massif. Toutes les opérations préliminaires indiquées plus haut sont
délicates, nécessitent une période de préparation assez longue, amèneront
des combats sérieux et ne donneront qu'une série de points d'appui,
constituant les véritables avancées de la position du Kahlerwasen.
C'est de là que devra partir l'attaque pour se rapprocher à distance
d'assaut, opération délicate à monter avec nouveaux travaux préparatoires,
dont il n'est pas possible d'évaluer la. durée.
En résumé,
j'entrevois la succession des opérations offensives de la VIIe
armée dans l'ordre suivant :
a. Reprise par
la 47e division de l'attaque du Sillackerwasen,
complétée par celle du Braunkopf, en liaison
étroite avec la 66e division, poussant tout d'abord sur Anlasswasen et Steinabrück et
ultérieurement sur Sondernach, Metzeral.
b. Opération du
Linge, Barrenkopf, Kuhberg,
par la 47e division, tandis que la 66e division
progressera méthodiquement, d'une part sur Hilsenfirst,
Ilienkopf, de l'autre vers Olschwasen,
Judenhutplan, Ospenkopf,
pour interdire la vallée de la Lauch et s'emparer
des avancées de la position du Kahlerwasen.
c. Attaque du Kahlerwasen par la 66e division;
continuation de la progression, vers l'est, de la 47e division, au nord de la coupure de la Fecht.
Toutes ces
opérations nécessiteront l'emploi de troupes assez importantes.
Tandis qu'à la
66e division la brigade Tabouis (8),
réserve d'armée, est destinée aux actions offensives méthodiques, dont le
détail vient d'être indiqué, j'estime que l'opération du Linge ne pourra
être menée à bien qu'avec un nombre de fusils égal à celui d'une division.
Deux btns de chasseurs pourront être prélevés sur l'ensemble
des troupes des 2e et 3e brigades de chasseurs et
remplacés sur le front par les btns territoriaux,
dont je dispose, actuellement employés aux travaux.
Il me faudrait,
en outre, la brigade Lacapelle (9) (3 btns de chasseurs) et la brigade Trouchaud
(10) (5 btns de chasseurs).
J'aurais ainsi
un total de 60 compagnies destinées à constituer les forces d'attaque
indispensables pour assurer la continuation des efforts et l'occupation du
terrain conquis dans une opération qui doit durer plusieurs jours.
La brigade Susbielle (11) serait obligatoirement employée, en
partie, a tenir, avec le groupe de btns de chasseurs du lt-colonel
Lançon, le front Reichackerkopf, Sattel, Sillackerwasen.
Conformément à
vos instructions, je ne fais pas état de la brigade de Belfort.
DE
MAUD'HUY.
1
Note du S. H. — Cf. annexe 68.
2
Note du S. H. — Commandant la 57e D. I.
3
Note du S. H. — Gal Legros, commandant le groupement sud de Belfort.
4
Note du S. H. — Non reproduites.
5
Note du S. H. — De la 47e D. I.
6
Note du S. H. — Cf. annexe 68.
7
Note du S. H. — Autre désignation du Kahlerwasen.
8
Note du S. H. — 1e brigade de chasseurs.
9
Note du S. H. — 4e brigade de chasseurs.
10 Note du S. H. — 5e brigade
de chasseurs, en réserve de G. Q. G.
11 Note du S. H. — 151e
brigade
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